Désertus Bikus…un vent de liberté !

Sur un fond sonore de DJ set aux lueurs d’un cactus fluo, il est minuit et un gars que tout le monde connait, casquette vissée sur la tête, hurle dans un mégaphone face à une horde sauvage… Un moment intense qui transforme le parking Harana de la salle des fêtes d’Hasparren en un véritable lieu de communion. Ici pas de prise de tête, pas de stress, juste des sourires et de la bienveillance. On s’apprête à vivre une expérience unique et intense. Le vélo une philosophie, le partage un art de vivre… Bienvenue à la Désertus Bikus !

Nous sommes 7 au départ, noyés dans ce peloton multicolore. C’est un atout ou un handicap de tenter l’aventure à 7, au choix ! Il y a Tony l’expérimenté,  fort de ses 2 précédentes participations. A la fin de la Désertus il aura triplé le kilométrage de sa préparation. Tony c’est la force tranquille ! Seb, solide rouleur et un air de Mathieu Vent de Poule. Bien posé sur sa machine, la classe, même ses sacoches ne font pas de faux plis. Sylvain qui arbore un maillot cosmique interstellaire. Une étoile dans ce ciel dégagé. Sam, mon fidèle équipier cadurcien qui a hâte de déguster les spécialités locales. Antoine alias Manu Chao (rapport à son album Clandestino), le gars qui ne peut rouler qu’en S8. Son autonomie sans tabac est aussi longue que la batterie de son éclairage avant… Et enfin Mathieu mon beauf qui vient de réaliser la veille qu’il fallait une sacoche pour partir à la Désertus !

Bref, nous voilà tous les 7 à minuit sur un parking à Hasparren, excités comme des puces et bien décidés à rallier Sétubal.

J1 Hasparren / Calatayud

3,2,1 go… ça part à gauche, ça part à droite, les GPS s’affolent et on suit le groupe. Une succession de toboggan dans lesquels Mathieu adopte une stratégie simple et efficace : la relance en haut du talus.  Pour le coup, ça va vite et il fait chaud.  A St Jean Pied de Port, arrêt bidon et saucisson. La montée du col de Roncevaux n’est pas très dure. Ça caille dans la descente, une partie de manivelle s’impose pour se réchauffer. Une Italienne nous prêtent main forte. Le sommeil nous guette… rien de tel qu’un arrêt de 15mn… étendus à même le sol. Constat, le sol est froid et on a toujours aussi sommeil. On enchaine avec la première partie gravel du périple, de nuit au bord d’une rivière. Tony ouvre la route, nous sommes là pour ça et nos gros pneus nous disent merci.

Dur dur de trouver pitance avant de rentrer dans les Bardenas… Mathieu toque à une porte et une aimable dame nous régale avec quelques tranches de pain de mie, du cheddar et des gâteaux sec.

Bienvenu dans le désert, la piste est roulante, le spectacle commence…  On longe la zone militaire. Sur la gauche, El Rallon et tout au loin le CP1, El Mirador de Juan Opisbo ! Comité d’accueil, certains se reposent, d’autres réparent les crevaisons. Option masque de boues pour un participant… on préfère la crème solaire. Aujourd’hui ça va taper !!!

Nous sortons des Bardenas après 50 km de Gravel… wahaouuuu, il est temps de manger. L’arrêt se prolonge… c’est la siesta ! On the road again, nous reprenons la piste tranquillement. Seb est sous gonflé. Une mèche, deux mèches et 3 bananes plus tard il faut se rendre à l’évidence… il faut chambrer ! Première avarie du groupe, touché mais pas coulé, nous repartons, besogneux à la tâche.

Fin de la journée à 20h00 à Calatayud. 310 km, 3900 m de déniv. Resto et vite au dodo… tout le monde est claqué.

J2 Calatayud / Zorita de Los Canes

Départ à 8h30 en direction du CP2. Nous rentrons dans la province de Guadalajara. L’appel du gravel est plus fort que nous… Avec Sam nous nous autorisons quelques hors pistes. Il y a des chemins partout, comment résister !!!

Tout à coup, un fracas de tous les diables nous sors la tête du guidon. Chute Jean René ! Radio Tour annonce un empilage sévère entre Tony et Antoine. Le palois est solide, le Montalbanais touché mais pas coulé. Une petite séance de mécanique pour redresser le dérailleur avant et tout rentre dans l’ordre. Regroupement général à Molina de Aragon. Le patron de la petite auberge Alcazaba est dépassé par les évènements, on fait la queue. Maitrise totale du vocabulaire rudimentaire pour nous autres voyageurs : hola senor, una grandé cerveza, agua con gaz, tortillas y bocadillos con jamon y quezo por favor. On rempli la sacoche de victuailles, une lichette de crème solaire, Mathieu allume la JBL, pas de rock sur sa playlist… tant pis l’électro fera l’affaire ! On suit le Rio Gallo en direction du CP2 à l’Ermita de la Virgen de la Hoz. Moment de plénitude, endroit calme et reposant. On se régale… et il faudra bien sortir de ces gorges… la montée jusqu’à Zaojeras est interminable. La pause fraicheur dans le bistrot du village fait du bien.

Direction les lacs avec une descente superbe et technique sur Pareja. Nous faisons l’autobus et notre petit groupe de 7 passe à 11. Ici le dress code n’est pas imposé… notre nouveau compagnons roule en chemise et claquette… et il appui fort quand il nous prend un relai. Le CP3 est en vue. Nous contournons Buendia pour une cession gravel sablonneuse qui nous mène jusqu’aux magnifiques et étranges sculptures de Caras de Buendia. Les bidons sont vides mais il ne reste plus que 19 km et 2 bosses avant le bivouac à la Caja Rural. Une descente technique dans un chemin caillouteux n’augure rien de bon… en face se dresse un chemin de VTT sur 1 bon km. La nuit tombe et nous poussons les vélos à la lueur des lampes. Moment très éprouvant. Cerise sur le gâteau, l’établissement ne propose pas de restauration… quelques tranches de jambons et les céréales du petit déjeuner font l’affaire… nous mangerons mieux demain.

240 km, 2800 m de déniv, tous au lit, nous sommes cramés !

J3 Zorita de Los Canes / Galvez

Nous repartons à 8h50 avec le ventre presque vide… Arrêt de 40 mn pour des tortillas et grandé café americano au bout de 10 km ! D’un commun accord le groupe se divise ! Nous partons sur les chemins avec Samuel tandis que le reste de l’équipe continue par la route. Des champs d’Olivier à perte de vue jusqu’à Villajero de Salvanes. Tiens tiens revoilà les routiers !!! Arrêt épicerie et tout le monde repart. Suivra une ligne de crête magnifique sur une piste sablonneuse. On se régale. Cette voie royale nous emmène à Aranjuez… cité royale. Il fait chaud. Un banc fait l’affaire pour le pique nique que nous partageons avec un chien et un pigeon qui visiblement n’apprécie pas notre compagnie puisqu’il me décore d’une magnifique médaille sur l’avant bras !

Du chemin et des chardons qui piquent sur une plaine monotone, voilà notre programme pour 45 km. Je suffoque et il est temps de faire le plein. Voici enfin Tolède, superbe ville inscrite au patrimoine mondial de l’Unesco. On se hisse au sommet comme on peut en restant sur le haut du pavé. Une terrasse charmante nous attend…. patron Cerbeza por favor ! Nous apprenons que le reste de l’équipe viens de décoller eux aussi de Tolède après un bon repas. Si on ne traine pas on devrait les rattraper avant le CP4… oui mais faut il encore passer au fameux CP4 ! Incroyable on le rate ! Une erreur impardonnable mais on accepte de rebrousser chemin sur 6 km pour prendre la piste qui nous mène au magnifique point de vue des Barrancas de Bujuron. Google map est mon ami et nous guide pour arriver au plus vite sur le CP4… aie un marécage nous stoppe… Sam se lance dans la traversée, cela n’a pas l’air trop long mais c’est profond ! on s’enfonce et la boue pénètre dans nos cuissards et nos chaussures ! quel bourbier… google n’est plus mon ami ! Bref la blague nous a fait perdre 1 h et nous retrouvons l’équipe à l’hôtel vers 21h30.

200 km, 2000 m de déniv. Arrivée tout juste à la tombée de la nuit. Encore une belle journée !

J4 Galvez / Orellana la Vieja

Grosse journée au programme ! Tony, Seb et Sylvain prennent un itinéraire bis pour lisser le relief. Nous formons un groupe de 4 avec Antoine, Math et Sam pour découvrir le Parc National des Cabaneros. La première montée pique un peu et nous rentrons dans un territoire sauvage mais tellement beau. Dans une descente, la baffle de Math se fait la malle. Une belle frayeur pour Antoine et un uppercut pour Mathieu. Nous retrouvons François et la vache qui rie à Horcaro de los Montes pour le repas de midi. Ils sont impressionnés par nos descentes de bières. On reprend la route et l’option chemin est de nouveau magnifique sur une piste de couleur ocre. Ça grimpe fort de nouveau, Mathieu tente une nouvelle technique pour rester au contact des grimpeurs : cela consiste à balancer fort son vélo de droite à gauche à la façon Abdoujaparov. Le mouvement provoque un balancier important au niveau de la sacoche arrière qui comme à l’image d’un castor le propulse vers l’avant. En théorie ça marche, en pratique ça couine et ça casse les oreilles à tout le monde !

Le groupe se sépare… Sam réserve une chambre a l’hôtel tandis que Math et Antoine continuent. La trace nous mène dans un cul de sac… regroupement général et gros débat sur le chemin à suivre. Nous reprenons nos esprits, notre force étant de rester groupir.  Alors on décide de passer ce fichu portail et d’emprunter la piste ou devrais je dire l’ancien lit du cours d’eau ! Moment épique, les mollets dans l’eau nous poussons nos machines et finalement ce chemin se termine… ouf ! Arrêt dans le bar du village au son d’un air de métal que crache un téléphone posé en guise de baffle sur une table. On comprend rien à ce que nous dit le pilier du bar mais on rigole bien !

Allez on continue, le paysage devient désertique. Une étendue sauvage sans arbres se dévoile devant nous. Nous sommes envoutés par ce lieu qui nous mène tout droit au CP4… Spiritus Sanctus ! Les bayonnais sont là, face à l’église blanche, superbe. Ce village inspire le respect, un décor de cinéma… j’adore. La suite est tout simplement magique. Des lacs sur lesquels flottent des ilots. A croire que les graphistes de Zwift sont venus passer des vacances dans le secteur. Le CP6 ne se laisse pas cueillir ainsi… une crevaison va anéantir nos chances de claquer la spéciale !!! Qu’importe, la lumière rasante qui illumine le passage du tunnel est magnifique, l’eau du lac cristalline, certains se baignent. Il nous reste 20 km. Antoine est au bout de sa vie, ça commence à tirer dans les cuissots. Ce soir c’est suite royale dans un 4 étoiles… la Bikus en mode bourgeois, ouais… pourquoi pas !

230 km, 3000 m +, la coupe est pleine n’en rajoutez plus !!!

J5 Orellana la Vieja / Redondo…ou Setubal (au choix !)

Nous prenons un peu d’avance avec Sam. L’équipe s’est retrouvé à notre hôtel le temps de boire un café++. Nous avons rendez-vous chez un membre de la famille de Sam à Don Benito pour le petit déjeuner. Erreur d’aiguillage dès la sortie de l’hôtel qui nous emmène sur une belle route de crête. Vent dans le dos, c’est easy ! A Don Benito, le club des 7 se reforme et nous sommes reçus comme des rois.  Churros party, chocolat très chocolaté, miel, confiture, café, fruit… bref nous sommes full. Grand merci pour ce petit déj extra.

Nous repartons vent dans le dos et ça file. Même les pistes Gravel sont avalées à vive allure. Attention de ne rien perdre… et nous croisons François qui a perdu sont téléphone que Sébastien vient juste de retrouver sur la piste !!!

A 13h nous n’avons pas suffisamment faim pour des tortillas, un arrêt succinct dans un supermercado nous suffit. La chaleur commence à monter, le vent nous pousse et les relais s’organisent. Sam lutte contre un échauffement aux pieds… nous laissons filer la troupe pour reposer la machine.

A Badajoz, peu avant la frontière Portugaise, la nouvelle vient de tomber sur Radio Tour… il semblerait que l’équipe des jeunes loups caresserait l’idée de rallier Sétubal d’une seule traite ! Soit une journée à 400 km pour finir cette Désertus en beauté. Nous déclinons l’invitation avec Sam…. il faut dire que je viens d’acheter une paire de claquette au Décathlon et je me vois bien les chausser ce soir peinard dans une chambre d’hôtel !!!

Le passage au Portugal fait du bien, enfin un peu de relief et une végétation aérée et paisible comme tous ces troupeaux qui nous regardent.

Redondo, arrêt dodo. 220 km et 1500 m+. Pendant que nos coéquipiers se prennent pour des hiboux en direction de Sétubal, ce soir c’est ligue des champions pour nous ! Réal contre Manchester City avec les petits Portugais qui arborent fièrement le maillot Madrilène. On se tape la cloche, serveur très serviable.

J6 Redondo / Sétubal

Décollage à 7h20 en direction d’Evora. Jolie ville où nous pouvons déguster notre tout premier Pasteis de Nata ! Tony, Sylvain, Seb, Antoine et Math viennent de franchir l’arrivée dans une brume automnale ! Ils l’ont fait les jeunes, la nuit s’est bien passée avec ses hauts et ses bas !

Nous continuons sur la trace, il est vrai que le temps se couvre. Les chemins sont fermés et nous ne devons nous rendre à l’évidence… il faut sauter les barbelés !!! Premier avertissement mais nous insistons sur la trace… Rebelote, nous sommes obligés de couper par un champ pour retrouver… la voie du chemin de fer ! Rencontre du troisième type avec le train à contre sens !!!

Arrêt buffet à Grandola, on recharge à grand coup de pizza et bocadillos. La Sagres est bien fraiche et nous sommes intrigués par ce petit verre qui accompagne systématiquement le café des clients… ? un alcool ? surement mais quoi ? une énigme que nous comptons bien lever… mais pas pour l’instant ! Il fait chaud et le CP7 se fait désirer. Alors on roule vers cette plage promise, la Praia de Galé. Nous croisons des filles qui en reviennent et filent vers le ferry. Il faut passer les dunes. Ambiance VIP, village club +++ et quartier résidentiel. Une fois de plus Yvan nous gatte, quel panorama cette plage. La vue est magnifique mais nous n’avons pas le courage de descendre les escaliers. Le tracker a bien borné notre position. S’en est fini de la quête des CP. On file en direction du Ferry qu’il ne faut pas rater sous peine d’attendre 1 h sur le quai. Un dernier arrêt à une station service pour boire un dernier coup et écouter du métal (oui c’est un passe temps local apparemment). Nous sommes 5 sur le ferry dont l’Italienne et 2 françaises. C’est chouette de terminer ainsi même si nous comprenons que ce périple vient de s’arrêter sur ce bateau. Un sentiment de nostalgie nous prend. Nous touchons au but tant attendu et pourtant nous souhaiterions que cette virée ne s’arrête pas si vite… un paradoxe bien naturel ! La fine équipe nous attend au bar sous la flamme qui symbolise la ligne d’arrivée. Ambiance, ambiance, les baroudeurs sont là. Yvan et son équipe nous accueille, la bière coule à flot. On est bien là.

La Désertus se prolonge le temps d’une soirée et s’achève ainsi. Cette épreuve est bien plus qu’une simple course à travers l’Espagne. Il règne ici un esprit de liberté façonné par la beauté des paysages. Une quête des CP ou chacun demeure libre d’avancer comme un avion de chasse, un baroudeur ou un rêveur. Dans notre train train quotidien, la Désertus ouvre une parenthèse pour s’évader dans la pampa.

Merci aux graveleux, aux coursiers, aux filles, aux barbus, aux tatoué(e)s, à ceux qui roulent en chemise, à ceux qui roulent en 40, à ceux qui roulent en sandales, à ceux qui boivent des pintes et fument des roulés, merci pour ces tranches de rires et ces belles rencontres. Merci à Yvan et toute son équipe pour l’accueil et les trouvailles des CP qui nous ont laissé sans voix.

Enfin ce fut génial de partager cette aventure avec Tony, Seb, Sylvain, Sam, Antoine et Mathiou. 1400 km en 5 jours et des bananes pour les hiboux et 6 jours pour les vieux sages ! On s’est bien marré les amis !

Hasta la vista baby !

(8 commentaires)

  1. Merci Nico pour tes récits toujours aussi captivants et inspirants ! La tête, les jambes et de bonnes bières à partager… Au top 😊

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